vendredi 4 décembre 2015

Mon vote utile.

Dimanche, il faudra aller voter. Depuis des mois déjà, on en discute entre nous de ces élections régionales : « Et toi, tu vas voter pour qui au premier tour ? ». Souvent, la réponse est hésitante, évasive, parfois indéfinie, rarement définitive. Signe qu’à gauche, on se pose des questions sérieuses.

Mais cette fois, dimanche approche, alors il va falloir choisir. Pas question de s’abstenir, je fais miens les mots de Patrick Pelloux : «  Allez voter, l’ennemi c’est l’abstention, l’ennemi c’est le silence ».

Alors dimanche, je rentrerai plus tôt de Rennes, un covoiturage à 14h et j’irai voter. J’ai fait mon choix, je choisirai la liste citoyenne « Nos vie d’abord ! » du front de gauche, emmenée en île de France par Pierre Laurent, Éric Coquerel et Clémentine Autain.
C’est un choix qui ne va pas de soi pour le militant socialiste que je suis. Mais, ni trahison, ni abandon, ni désertion, c’est finalement, le choix de la raison. Je veux dire, en quelques lignes, pourquoi.
D’abord parce que depuis de longs mois, je fais partie d’un collectif. Celui qui a décidé d’agir et de militer ardemment pour qu’un nouveau chemin s’ouvre à gauche. Refusant de voir notre camp s’embourber, s’entêter et finalement s’échouer dans l’impasse des grands renoncements. Refusant la résignation qui consiste à regarder, impuissant, la gauche disparaître dans le coin du rétroviseur. Nous nous sommes donc mis en mouvement.
Ce combat pour l’émergence d’une alternative à gauche, qui rassemblerait sans exclusives, tous ceux qui n’ont pas renoncé à transformer la société : socialistes en rupture, écologistes, forces du front de gauche et énergies citoyennes, nous l’avons mené sur de nombreux terrains. Sur le terrain politique, dans notre parti, à l’occasion du congrès de Poitiers. Sur le terrain social, à l’occasion des nombreuses mobilisations auxquelles nous avons participé. Sur le terrain culturel, en construisant des convergences idéologiques, toujours plus solides, avec les autres sensibilités de la gauche autour d’une nouvelle matrice : celle de l’éco-socialisme. Alors, il serait finalement absurde de ne pas mener ce combat pour une alternative sur le terrain démocratique à l’occasion de ces élections régionales. Il serait absurde d’oublier cette tâche le temps d’un dimanche électoral, de voter comme si de rien n’était. Ne laissons pas notre volonté de construire un autre chemin à la porte du bureau de vote, comme on y laisserait son chien.
Le bureau de vote ne doit pas être un sanctuaire imperméable à nos réflexions, à nos convictions profondes et à nos combats au prétexte de « responsabilité » ou de vote « utile ». Le vote est utile quand il est au service d’une stratégie politique claire et lisible. La nôtre est de recomposer la gauche pour proposer un nouveau chemin. Le bureau de vote est un immense espace démocratique. C’est là que commence toute construction politique, que fleurit toute ambition collective. Saisissons-nous en.
Certes, en île de France, comme dans de nombreuses régions, notre volonté commune de bâtir une alternative ne s’est pas traduite dans une dynamique politique unitaire rassemblant, au-delà des chapelles partisanes. Comme souvent, les petits sectarismes, les petits réflexes d’appareils et les petites considérations personnelles des uns et des autres nous ont encore conduis à un grand échec : celui de ne pas réussir à présenter des listes qui fédéreraient les forces de gauche sincères et l’immense énergie citoyenne qui sommeille dans notre pays. Il y a un an, Benoit Hamon,  Cécile Duflot et Jean-Luc Mélenchon participaient à un débat télévisé sur France 2 : « Une autre politique est-elle possible ? » Tous répondaient oui. Ce  grand « Oui », nous avons échoué à le traduire dans une démarche politique nouvelle.
Mais les listes citoyennes du front de gauche sont celles qui sont restées le plus fidèles à cette ambition. Il ne faut pas détourner le regard au moment où, se créé un embryon, même fragile, de l’alternative que nous voulons.

Ces listes se sont illustrées par la volonté d’élargir le rassemblement que constitue le front de gauche à une démarche inédite plus large. Des choix ont été engagés pour se donner les moyens d’une réelle implication citoyenne, au-delà des intentions. L’édifice final est instable, bien sûr. Mais la campagne a été collective, animée par un trio de candidats, les listes ont été largement ouvertes aux citoyens non-encartés, aux acteurs associatifs et syndicaux qui font vivre les luttes dans notre région. Enfin, un programme politique clairement ancré à gauche a fait la démonstration que la gauche n’était pas condamnée à une perspective « gestionnaire », mais qu’elle pouvait encore placer, au cœur de son action, la ferme volonté d’agir pour vivre mieux.
Dans l’offre politique qui nous est soumise, faire le choix, au premier tour, de voter pour les listes du front de gauche, c’est donc traduire dans le champ électoral, la volonté politique qui est la nôtre de faire émerger une alternative à gauche.

Bien sûr cela ne suffira pas. Comme il n’est pas de sauveur suprême, il n’est pas de baguette magique et un vote ne fera sans doute pas le printemps. La tâche qui sera la nôtre au lendemain des élections régionales sera aussi grande que celle qui était la nôtre hier. Mais une performance électorale des liste citoyennes et écologistes, à quelques mois d’une campagne présidentielle qui s’avance, sera incontestablement un point d’appui pour celles et ceux qui feront le choix de construire une candidature alternative à gauche en 2017.

Voilà mon choix. Ni trahison, ni abandon, ni désertion. Mon choix de la raison, mon vote utile.
Enfin, dès lundi, dans le RER de 7h18 qui m’emmènera travailler, une nouvelle question se posera : « Et maintenant, je vote quoi » ? La dessus, je veux être clair, il n’y aura pas l’ombre d’un doute. Aucune tergiversation. La liste de gauche arrivée en tête au premier tour devra emporter tous nos suffrages au second. Parce qu’il s’agira de nous protéger des ravages profonds et des grandes régressions que nous réservent la droite et l’extrême droite si elles parviennent aux responsabilités. Leur action nuirait gravement à nos régions, culturellement, économiquement, socialement. Il n’est pas question de laisser faire.
Aller, je termine mon café, mon train pour Rennes m’attend.

 

 

mercredi 11 novembre 2015

Mouvement commun: lancement réussi. Continuons.

Il y a des moments politiques qui, par ce qu’ils insufflent, sortent de la morosité politicienne ambiante. A n’en pas douter, l’événement fondateur du « Mouvement commun » initié par Pouria Amirshahi, qui s’est tenu hier à Montreuil, est un de ceux-là. A la croisée des espoirs de citoyens orphelins d’un horizon de progrès et de solidarité, il nous a promené entre combativité et convivialité. Entre optimisme et participation collective. Un nouvel horizon.

Sous un soleil inattendu en ce début novembre, et sous le toit en tôle de la « Parole Errante», institution culturelle et militante de l’Est parisien, plus de 700 militants, acteurs associatifs, syndicaux ou citoyen-ne-s se sont réunis pour penser, pour dialoguer, pour échanger, pour construire « la France d’après ». Incontestablement, ce fût une réussite.
L’événement était préparé depuis de longues semaines, animé par une ambition : celle de faire de la politique vraiment autrement avec tou-te-s celles et ceux qui veulent un autre chemin à gauche. Et il y avait du monde.

Tout commence par la reconquête démocratique.


Ce rassemblement se voulait une réponse directe à la crise de notre modèle démocratique représentatif qui, à bout de souffle, se mue lentement en un modèle confiscatoire des pouvoirs et des richesses. Il s’agissait de donner la parole à ceux qui ont depuis trop longtemps l’impression que plus personne ne les écoute. Parce que lentement, le camp de ceux qui ont toujours été hostiles à ce que le peuple soit aux affaires est en train de prendre sa revanche sur l’immense héritage démocratique des Lumières et de la Révolution française.
Aujourd’hui, trop souvent ceux qui parlent et ceux qui décident sont ceux qui possèdent. Et ceux qui possèdent sont ceux qui décident et ceux qui parlent. Ils se connaissent, s’organisent et souvent se protègent entre eux. L’alternance politique de 2012 n’a hélas pas permis d’engager une rupture avec ce processus oligarchique.

Plutôt que de regarder s’éloigner dans le rétroviseur notre capacité à définir souverainement notre propre avenir, nous devons porter une nouvelle contagion démocratique. Pour bâtir un avenir commun, nous devons construire un mouvement commun.

Il ne s’agit pas d’importer le modèle grec ou espagnol de Syriza ou de Podemos, mais de s’inspirer de leur combat pour le prolonger chez nous. Nous ne nous résignons pas à ce que les solutions xénophobes de haine et de repli sur soi progressent dans notre pays alors qu’une issue de solidarité et de progrès fleurie chez nos voisins. L’énergie sociale de notre pays, sa profonde aspiration démocratique, l’étendue de sa recherche scientifique, sa devise de fraternité doivent nous permettre de formuler un nouveau projet politique commun et émancipateur. Dire cela, c’est refuser de rester un spectateur isolé face au grand risque démocratique qui s’avance. Nous voulons agir en commun pour proposer tout autre chose.

Faire autrement pour faire autre chose.


« Autre chose », c’est ce que nous avons fait ce dimanche en réunissant autour d’une même ambition des militants politiques issus de toutes les composantes de la gauche traditionnelle et la formidable énergie citoyenne issue de ceux qui font vivre l’alternative au quotidien dans notre pays. Ce mouvement est commun à tous ceux qui souhaitent faire vivre un « Nous » d’espoir et de progrès. D’où qu’ils viennent et quel qu’est été leur parcours personnel. La seule adhésion à laquelle nous nous référons n’est pas celle d’un parti, mais celle de vouloir emprunter ensemble un nouveau chemin.

« Autre chose », c’est ce que nous avons entendu. Ce dimanche après-midi, la « Parole Errante » aura fermé ses portes aux leçons de catéchisme libéral et aux grandes tirades qui nous répètent « qu’il n’y a pas d’alternatives ». En donnant la parole à Abdelhafed Errouihi, délégué CGT d’Air France ou à Nicolas Prevost, président de la SCOP de la papeterie de Docelles, c’est la voix de ceux qui défendent l’emploi et l’humain face à la violence des stratégies financières qui s’est exprimé. Et qui a été longuement ovationnée. En donnant le micro à Jean-Paul Sauzede, administrateur d’Habicoop, coopérative d’habitants, c’est la voix de ceux qui luttent contre la spéculation immobilière que nous avons entendu.  
« Autre chose », c’est ce que les responsables politiques ont fait ce dimanche. Présents nombreux, ils n’étaient pas à la tribune. Ils ont contribués, comme chacun et chacune d’entre nous à l’émergence de ce mouvement commun. Ainsi a-t-on pu apercevoir Danielle Simonnet se fondre à la table d’un des ateliers collaboratif, Pierre Laurent ou Cécile Duflot s’asseoir dans les travées de la plénière, loin des premiers rangs qui leurs sont d’habitude réservés, ou encore Guillaume Ballas s’échiner au rangement des chaises une fois l’évènement terminé.

Pour toutes ces raisons, cet événement aura été un succès et aura contribuer à dessiner un nouvel horizon.

Pour un mouvement commun qui s’inscrit dans le combat électoral. 


Ce travail, il va falloir le continuer ardemment.  « Autre chose », c’est ce qu’il faut construire désormais. Il faut faire « contre-culture » pour remettre au goût du jour les idées de solidarité, de renouveau démocratique et d’impératif écologique. Il s’agit d’engager une longue opération de reconquête idéologique, sans enjamber les échéances électorales qui s’avancent.

Car on ne peut pas faire état du dessaisissement démocratique qui frappe les citoyens et se résoudre à ce que les choix électoraux futurs ne se résument à devoir départager une droite qui s’extrêmise et une gauche qui l’est de moins en moins. Le dessaisissement démocratique c’est aussi accepter que la compétition électorale soit réservée à une poignée d’acteurs qui ont tous appartenus aux « gouvernants incapables de résoudre les questions du XXIe siècle ». 2017 ne doit pas être la grande revanche, des acteurs politiques et des idées, qui ont échouées dans notre pays ces vingt dernières années. Ce n’est pas cela un choix démocratique.

Cet « Autre chose commun » auquel nous aspirons, nous devons le faire vivre partout, et aussi dans la compétition électorale. Je le crois. La vie politique française et sa structuration idéologique sont largement adossées à l’élection présidentielle. On peut le regretter, mais c’est ainsi. La bataille culturelle que nous voulons réengager se mène toute l’année, partout. Elle vit et grandit chaque jour par la pratique de solutions alternatives concrètes qui, jointes, constituent cet autre chemin que nous voulons emprunter. Mais ne négligeons pas le porte-voix que représente l’élection présidentielle pour promouvoir et faire gagner cet autre modèle économique, démocratique et écologique.

Pouria a hélas raison lorsqu’il résume le paysage politique de 2017, pour le moment, à « des candidats soutenus par des appareils fatigués et souvent fatigants, qui proposent aux électeurs une série de mesures élaborées par quelques experts ». Le tableau est bien sombre, il correspond à une réalité palpable, mais je refuse de croire qu’il est immuable.

L’énergie et la détermination qui se sont dégagées de la journée de dimanche sont la démonstration que nous sommes des milliers de militants et citoyens disponibles pour écrire une autre histoire. Nous sommes des milliers à refuser que les sectarismes, les vieux réflexes partisans et les bisbilles d’appareils l’emportent sur la fervente volonté de créer un Mouvement commun qui puisse porter la belle colère de toutes celles et de tous ceux qui résistent à gauche.

Ces sentiments sont partagés bien au-delà de nos rangs. Dimanche, dans les rangées de la « Parole Errante » on pouvait croiser de nombreux militants communistes, écologistes, issus du parti de gauche ou d’ensemble. Leur présence atteste que tous connaissent l’impératif de parvenir à rassembler nos forces pour faire naître une nouvelle dynamique populaire. Tous savent aussi que cette dynamique politique devra être débordée par une insurrection collective et citoyenne la plus large possible pour partir à la reconquête des cœurs et des esprits.

Si nous disons tous cela, c’est que nous parlons la même langue : celle de ceux qui veulent partager les richesses et les pouvoirs. Cette voix, nous devons la porter ensemble. Notre capacité à la rendre audible et attractive dépendra de notre réussite à construire un grand mouvement populaire autour d’une candidature unique de la gauche alternative en 2017. N’y renonçons pas.

Prenons nos responsabilités. Pour faire mouvement commun,  appelons, partout où nous le pouvons, à la constitution d’Assemblées Citoyennes rassemblant les militants politiques d’où qu’ils viennent, les syndicalistes, les acteurs associatifs ou les citoyens pleins d’espoir. Ces Assemblées souveraines devront respecter la règle d’une personne = une voix. Déployons nos forces et notre savoir-faire pour que dans les mois qui viennent, chacune de ces assemblées, partout sur le territoire organise des cahiers de doléances du XXIe siècle en se tournant vers la société. Recensons et inspirons nous des « bonnes nouvelles » qui marchent dans nos régions. Collectons les idées nouvelles en donnant la parole à ceux qui ne l’on plus depuis trop longtemps. Faisons mouvement, et faisons-le en commun, à tel point qu’aucune décision personnelle, qu’aucun acte isolé, ne puisse venir ébranler l’édifice que nous allons bâtir ensemble. L’aspiration au rassemblement de toutes les forces de gauche porteuses de solutions nouvelles est immense, travaillons à ce qu’elle n’échoue pas aux portes des échéances électorales.

Peut-être n’y arriverons-nous pas. Peut-être le poison des égos des divisions et des sectarismes finira par l’emporter. S’ouvrira alors une immense tâche de reconstruction idéologique, culturelle et politique qu’il faudra être prêt à affronter. Mais peut-être aussi parviendrons-nous à rendre le chemin de l’unité incontournable. Ne préjugeons de rien, créons du commun autant que possible, additions les énergies disponibles. Nous verrons.

Dimanche, je ne sais plus quel intervenant nous a adressé cette jolie phrase que je me suis empressé de noter : « Les abeilles ne butinent pas les fleurs fanées ». Nous avons la responsabilité de tout faire pour que 2017 ne soit pas une fleur fanée. Il n’est pas trop tard.

 
 

mercredi 21 octobre 2015

Sous la chemise, la lutte des classes.


Le 5 octobre dernier, les salariés d’Air France faisaient tomber la chemise de leur DRH. Le 8 octobre, à l’occasion d’une journée de grève, des dizaines de milliers de salariés manifestaient partout en France sur l’air du tube de Zebda pour faire vivre leur solidarité. En face, la France des « belles personnes » redécouvrait avec terreur la dureté et l’âpreté des conflits sociaux et se rappelait un phénomène qu’elle voulait oublié et révolu, mais qui a fini par leur revenir au visage avec fracas : Celui de la lutte des classes. 
On ne peut pas analyser et comprendre ce qui s’est passé à Air France sans prononcer ces trois mots qui grattent tant l’oreille des puissants.
Nous avons été nombreux à exprimer notre solidarité avec les salarié(e)s d’Air France. Nous comprenons leur colère et leur exaspération et nous avons raison. La direction de la compagnie leur a annoncé, par voie de presse, que 2.900 d’entre eux se verront jetés à la rue dans les mois qui viennent. Pour nombre d’entre nous, c’est bien là que se situe la violence. Cette violence systémique du capitalisme, qui se fait sans cris, sans heurts, sans tumulte, qui se décide dans la discrétion et l’entre soi d’un conseil d’administration, comme le disait Jaurès, mais qui frappe et qui fait mal en précipitant des milliers de travailleur(se)s et leurs familles dans la précarité économique.

La colère qui s’est exprimée ce jour-là signifie quelque chose de fondamental que la gauche doit entendre : désormais dans ce pays, les salariés n’acceptent plus cette violence, ils n’acceptent plus de servir de variable d’ajustement aux stratégies économiques et à la folie financière de leurs dirigeants. Et ils se feront entendre. 
Face à cette violence du capital, le recours à la force devient parfois le seul exutoire quand tous les autres recours ont été obstrués. La pratique du « dialogue social » suppose d’avoir un interlocuteur qui vous entend, qui vous répond. Racontez vos vacances à un sourd muet, vous verrez que le dialogue tournera court. C’est hélas le constat qu’on fait les salariés d’Air France lorsqu’ils se sont adressés à leur direction. Ils ont pratiqué le langage des signes.
Hannah Arendt écrivait en 1972 : « En certaines circonstances, la violence – l’acte accompli sans raisonner et sans réfléchir aux conséquences- devient l’unique façon de rééquilibrer les plateaux de la justice ».

Il y avait de la dignité dans cette colère. Celle de femmes et d’hommes qui font vivre au quotidien une compagnie aérienne dont nous sommes fiers. Celle de femmes et d’hommes simplement mais profondément attachés à leur emploi et engagés à le défendre face à ceux qui ont des intérêts divergents. Cette chemise en lambeau c’est celle des déchireurs déchirés. C’est celle de ceux qui, d’habitude bien à l’abri, déchirent les familles, les vies et le bonheur des autres. C’est un coup de griffe dans l’impunité et la toute-puissance des cols blancs. Et voilà qu’en quelques jours l’image de ces deux sans-chemises est devenue l’étendard  des millions de sans-culottes de notre pays.
Cet étendard il a fait peur à ce peuple des « bonnes personnes », ces habitués des Conseil d’Administration feutrés, ceux-là qui squattent la direction de nos grandes entreprises. Ils ont eu peur de la contagion. Peur que demain, ce soit leur chemise qu’on arrache.

Ils ont raison. Pourquoi ne déchirerions-nous pas celle du PDG de la Société Générale qui envisage de supprimer 2.000 emplois quelques semaines après avoir touché 38 millions d’euros d’argent public au titre du CICE ou celles des dirigeants de Smart qui exigent de leurs ouvriers qu’ils travaillent désormais 39h payées 35h sinon quoi ils licencieront.
Alors pour prévenir de la contagion, tout ce beau monde s’est organisé pour vilipender la réaction des salariés d’Air France, les diaboliser et criminaliser leur colère. Le système médiatique et une grande majorité de la classe politique ont accordé leurs violons, fidèles au vieil adage : « Forts avec les faibles et faibles avec les forts ». « Voyous », « chienlit » a-t-on entendu. Le message qu’il fallait réciter telle une leçon de catéchisme a été le suivant : Les salariés d’Air France sont des sauvages sans foi ni loi qui ont voulu « lyncher » (sic) de respectables dirigeants d’entreprise ».
Et pour bien convaincre de la culpabilité de ces salariés, la démonstration allait s’accompagner d’une opération d’arrestation volontairement spectaculaire. Le 12 octobre, six salariés de la compagnie sont interpellés à 6h du matin à leur domicile puis déférés au parquet 48h plus tard. Dès lors que ce traitement s’apparente plus à celui d’une menace pour la sécurité nationale plutôt qu’à l’interpellation de six salariés, présumés innocents, comment douter de leur culpabilité ?
Mais les Français n’ont pas été dupes. Malgré la fabrique d’une opinion hostile, 54% d’entre eux ont affirmés « comprendre » la violence qui a été celle des salariés.

Plutôt que cette réponse de fermeté et de répression, qui nourrit la tension des rapports sociaux dans la compagnie, et dans toute la société, c’est à l’émergence d’une solution politique qu’il aurait fallu travailler. Une issue qui permette de sortir du conflit et de concilier, sur le temps long, le maintien de tous les emplois et le développement d’une grande entreprise nationale.
Pour cela, des choix doivent être rapidement fait :
La levée immédiate des poursuites et des procédures disciplinaires engagées contre les salariés. Parce que l’acharnement répressif n’est pas favorable au retour de la sérénité et d’un dialogue social apaisé.
L’abandon immédiat du plan de licenciements. Parce qu’il est absurde de penser que le développement de la compagnie, dans un contexte de croissance du transport aérien, se fera en réduisant son personnel (au sol et en vol), ses investissements (renouvellent d’appareils) et son offre (fermetures de lignes).
L’intervention de la puissance publique pour promouvoir des solutions alternatives et un autre avenir pour le secteur aérien français. Celui-ci dispose d’immenses atouts : image prestigieuse, première destination touristique mondiale, infrastructures aéroportuaires de qualité, premier constructeur aéronautique mondial (Airbus), et représentent des centaines de milliers d’emplois et une forte attractivité pour notre économie.
L’Etat, actionnaire de la compagnie doit agir. Il ne peut plus continuer à accepter que la direction d'Air France précipite l'entreprise dans un mur. Disposer d'une compagnie nationale est un enjeux et une condition de l'attractivité de notre territoire.  Il est de sa responsabilité d’engager un plan d’investissement massif pour Air France en s’appuyant sur une véritable stratégie d’intérêt national et en engageant une action forte de régulation de l’environnement économique très concurrentiel du secteur aérien.

La main visible de l'état doit en effet mettre un terme au puits sans fond de la stratégie de low-costisation de notre économie qui quand elle est exacerbée, n'est rien d'autre qu'une low-costisation des conditions de travail et des rémunérations des personnels. Enfin, l'état doit garder le contrôle public de nos aéroports et notamment d'Aéroports de Paris (ADP) afin de développer une nouvelle coopération économique avec Air France (par la baisse de la redevance aéroportuaire notamment).
Pour exprimer notre solidarité avec les salariés d’Air France retrouvons-nous à leur côté demain à partir de 13h place de la Concorde. Ce combat est aussi le notre.

 

 

mardi 29 septembre 2015

Les primaires, l’éteignoir des espoirs à gauche.

Nous sommes en septembre 2015 et voilà que le débat sur les primaires refait surface à gauche. Confronté à l’impasse dans laquelle tente de nous enfermer le gouvernement : devoir choisir entre l’extrême droite, la droite extrême et la « gauche » (qui n’a de gauche plus que le nom), certains tentent d’imaginer un nouveau chemin qui passerait par l’organisation de primaires. Mais plutôt qu’une nouvelle consultation d’un jour, c’est une véritable implication citoyenne que nous devons construire pour proposer un autre chemin au peuple français.

Indéniablement, en 2011, les primaires socialistes avaient été un succès démocratique mobilisant plus de deux millions et demi de votants. Mais, déjà, nous en constations les limites. Rémi Lefebvre soulignait que ce processus participait à la personnalisation et à la présidentialisation de la vie politique. Le débat démocratique s’était restreint à un casting entre « présidentiables ». Alors qu’il aurait fallu débattre du socle politique à partir duquel nous voulions mobiliser la société puis la transformer, la question s’est souvent résumée à se demander qui était le mieux placé pour battre Sarkozy. La machine médiatique a délivré son verdict et choisi son candidat, dès lors, les débats n’étaient, hélas, plus qu’une mise en scène de différents profils. Ces primaires ont permis de désigner un candidat, jamais d’associer les millions de citoyens et l’immense énergie populaire disponible à la construction d’un projet politique commun. L’échec du quinquennat de François Hollande en est l’immédiate traduction.

Les enjeux qui s’ouvrent à la gauche aujourd’hui sont d’une toute autre nature. Il ne s’agit plus de désigner celui ou celle d’entre nous qui est le mieux à même de battre le président sortant, mais d’ouvrir, dans la nécessaire recomposition qui vient, le chemin du rassemblement de toutes les volontés militantes et citoyennes disponibles pour dessiner une démarche politique inédite, ancrée à gauche et à vocation majoritaire.

De la machine à gagner en 2012 à la machine à perdre en 2015

Au Parti Socialiste, la mue libérale orchestrée par le gouvernement, a provoqué l’isolement du parti au sein de la gauche, la baisse inquiétante du nombre de ses militants, et, plus grave encore, un divorce avec son électorat traditionnel. Dés lors, comment pourrait-on escompter une large mobilisation du peuple de gauche pour désigner le candidat d’un parti qui n’a cessé de les décevoir pendant cinq ans ?

Nous ne sommes pas de ceux qui pensent que l’organisation de primaires, même ouvertes au PRG, aux écologistes isolés, ou à tout autre bagage accompagné, rendrait acceptable, à gauche, la candidature de François Hollande ou de Manuel Valls. Nous ne sommes pas non plus de ceux qui pensent qu’une candidature issu des « frondeurs », quand bien même obtiendrait-elle un résultat notable, suffirait à changer la donne. Conscient de l’état de mort cérébrale dans lequel la gauche est plongée et du grand risque démocratique qui s’avance, nous refusons de nous cantonner à des rôles de figurants politiques qui se rallieraient au candidat social-libéral sitôt les primaires passées. Enfin, nous ne sommes pas non plus de ceux qui font le pari de reconstruire sur les décombres de nos appareils respectifs après 2017. Cette voie est bien trop dangeureuse. Nous affirmons au contraire notre volonté d’agir en amont pour proposer un autre chemin, une autre issue: celle d’une candidature alternative unique en 2017.

Dans l'autre gauche, les « primaires de l’espoir », proposées par Julien Bayou (associant la gauche du PS, l’ensemble du Front de Gauche, EELV et Nouvelle Donne) ne constituent pas non plus le graal politique que l’on pourrait espérer. Si nous partageons avec Julien la fervente volonté de créer un mouvement commun qui puisse porter la belle colère de toutes celles et tous ceux qui résistent à gauche, nous craignons que les primaires ne soient pas la bonne route pour y parvenir.

Parce que, une telle initiative serait nécessairement jugée à l’aune de la primaire socialiste de 2011. Et soyons clairs, compte tenu du saccage de la gauche opéré par François Hollande et de l’état moribond de nos organisations respectives, nous doutons de pouvoir réunir 2 800 000 votants sur une pré-présidentielle. La seule mobilisation des cercles militants initiés aux débats de l’autre gauche ne peut pas être une perspective démocratique satisfaisante.
Et surtout, parce que nous savons qu’au vu de l’immense tâche qu’elles ont à accomplir, les forces de l’autre gauche ne peuvent se permettre le luxe de s’affronter et de mener campagne les unes contre les autres des mois durant. Elles en ressortiraient collectivement essoufflées, laminées et terriblement affaiblies. Les aventuriers qui mettraient le doigt dans cette machine à fracturer y perdraient leur bras. Les mois qui viennent ne doivent pas servir à mettre en scène un artificiel affrontement qui verrait Pierre Laurent s’opposer à Cécile Duflot, qui elle même s’opposerait à Jean-Luc Mélenchon, qui lui même… Le grand désastre.

Nous sommes convaincus que la mobilisation et l’implication de toutes les énergies d’un peuple de gauche las des renoncements gouvernementaux depuis longtemps ne se fera pas autour d’une consultation-spectacle qui soulève beaucoup de poussière et élève des murs là où il y a urgence à construire des ponts. Nous devons proposer autre chose.

Créer du commun entre toutes nos familles au service des citoyens, sincèrement, sans sectarisme, sans bisbilles d’appareils ou de calculs politiciens, voila la seule responsabilité qui nous incombe à l’heure où les convergences qui nous rassemblent sont de plus en plus nettes. Sur l’impératif d’un éco-socialisme qui respecte l’humanité universelle et son environnement, nous sommes d’accord. Sur la nécessité d’une reconquête démocratique par la transformation des vieilles institutions de la Ve République, nous sommes d’accord. Sur l’urgence d’un nouveau partage des richesses en faveur du monde du travail pour vaincre la pauvreté et la précarité, nous sommes d’accord. Enfin, sur l’incontournable combat européen et l’assomption du rapport de force avec les institutions de l’Union, nous sommes encore d’accord.

Ce socle politique commun que nous avons patiemment construit depuis dix ans avec le combat unitaire contre le Traité Constitutionnel Européen, est précieux. C’est un  terreau fertile pour construire l’unité politique de notre camp, préalable au rassemblement populaire bien plus vaste auquel nous aspirons. Ne bradons pas cet acquis dans le siphon de primaires qui risquent d’absorber nos idées, notre unité naissante et nos énergies. La préparation des échéances présidentielles doit être l’occasion de créer les conditions d’une insurrection collective par l’implication citoyenne la plus large possible. Elle ne peut en aucun cas être le hochet de celle ou de celui qui aura réussi à se démettre de ses camarades de combat.

L’implication citoyenne, plutôt que la consultation éphémère

Plutôt que de consulter les citoyens le temps d’une primaire électorale, il faut les impliquer dans la construction d’une nouvelle démarche politique au service de leurs aspirations. Selon un récent sondage, 74% des français souhaitent que « les idées viennent des citoyens pour aider les élus » alors que seul 24% pensent que les « idées doivent venir des élus dont le rôle est d’avoir une vision et de convaincre les citoyens ». Nous devons tenir compte de ce renversement du modèle politique traditionnel.

Incontestablement, de notre capacité à créer les conditions d’une véritable implication citoyenne, dépendra notre réussite à construire un grand mouvement populaire autour d’une candidature unique de la gauche alternative en 2017.  

Soyons donc ambitieux sur la méthode, inspirons nous de ce qu’ont réussi à faire nos camarades de la (trop) grande région Midi-Pyrénée/Languedoc-Roussillon où l’ensemble des forces du Front de Gauche, d’EELV et des socialistes critiques ont choisi de constituer des Assemblées Citoyennes pour bâtir et porter une alternative. La règle est simple dans ces assemblées inédites : une personne = une voix. Militants politiques encartés, syndicalistes, acteurs associatifs, ou citoyens qui choisissent de s’impliquer dans la vie de la cité, tous peuvent décider collectivement des revendications, des choix de candidats et des options stratégiques de la liste. Voila comment concilier, dans une nouvelle alliance, la force incontournable de nos appareils politiques avec l’immense énergie citoyenne qui sommeille dans notre pays. Au lendemain de élections régionales, multiplions partout où nous le pouvons ces Assemblées Citoyennes. Déployons nos forces et notre savoir faire militant pour que chacune d’elle, partout sur le territoire, organise les cahiers de doléances du XXIe siècle en se tournant vers la société. Donnons la parole, collectons les idées auprès de tout ceux qui ont l’impression, depuis trop longtemps, que plus personne ne les écoute. Enclenchons l’insurrection citoyenne pour un nouveau mouvement commun.

La mise en place de quelques principes simples contribuera également à rétablir la confiance dans l’action politique comme le non-cumul ou les comptes-rendus de mandat. La pérennité des Assemblées Citoyennes au delà du scrutin électoral permettra à chacun de se réapproprier le pouvoir politique au quotidien et sur un temps long.  

Enfin, soyons à la hauteur de moyens de communication que le XXIe siècle met à notre disposition. En 2015, 42 % des Français indiquent avoir déjà signé une pétition en ligne et 26 % avoir déjà donné leur avis sur un projet ou un enjeu politique par Internet. L’espace à conquérir est donc immense pour ceux comme nous qui se réclament des masses. Permettons, autant que possible l’auto-organisation et la participation en ligne. Notre candidat ne sera pas le candidat des médias, ce n’est qu’en devenant notre propre média, grâce à la puissance des réseaux sociaux, que nous serons à même de diffuser un programme de transformation sociale et écologique.    

L’urgence est donc à la construction de ces belles Assemblées Citoyennes, dépassons nos chapelles respectives. De cette grande insurrection populaire, naîtra la légitimité de celui ou de celle à qui reviendra la noble tâche de porter nos colères et nos espoirs en 2017.

Mathurin Lévis, membre du Bureau National du Mouvement de Jeunes Socialistes.
Hugo Roëls, membre du pôle des relations unitaires et co-secrétaire du Xe arrondissement du Parti de Gauche.

mardi 28 avril 2015

Népal: pour une vraie politique de solidarité !


Le terrible tremblement de terre, d’une magnitude de 7,8 qui a frappé la vallée de Katmandou au Népal livre ses premières horreurs. Le bilan humain, déjà très lourd, ne cesse de s’alourdir : 5.000 personnes ont déjà été tuées, 7.000 blessées, des milliers sont encore portées disparues.
 
 
Cette catastrophe naturelle, la plus importante qu’ai connu le pays depuis 1934, a ravagé les infrastructures nationales, détruit les sites touristiques vieux de plusieurs siècles et saccagé des hectares d’exploitations agricoles, première activité économique du pays. Le Népal est un des pays les plus pauvres du monde (le taux de pauvreté y avoisine les 30%). La terre a tremblé là où la vie est déjà rudement frappée par le sous-développement
La France doit être le fer de lance d’une véritable politique de solidarité internationale, permettant de faire face à la crise humanitaire qui s’annonce et de créer les conditions, pour le pays, d’un nouveau développement. Une aide d’urgence et l’annulation de la dette népalaise doivent constituer les piliers de cette politique solidaire.
La solidarité internationale dans laquelle s’inscrit l’idéal de la patrie républicaine est celle d’une solidarité qui s’organise partout où des drames humains d’ampleur planétaire se vivent. Cette solidarité doit se concrétiser par une aide d’urgence mobilisant un soutien humain, matériel et logistique le plus large possible pour faire face à la crise humanitaire qui s’annonce. Toutes les capacités d’intervention de l’Etat doivent être mobilisées et la France doit peser en faveur d’une action rapide et ambitieuse de la communauté internationale, particulièrement auprès de ses voisins européens.
Parce que les deux secteurs économiques qui assuraient la survie de millions de népalais : le tourisme et l’agriculture, ont été profondément impactés, l’avenir du pays est suspendu et sa reconstruction sera longue et couteuse.
Dans cette perspective, une véritable politique de solidarité ne peut se limiter à une aide d’urgence, indispensable mais hélas insuffisante. La France doit s’engager, comme elle l’a fait en 2010 au Congo ou en 2012 en Côte d’Ivoire, dans une logique d’annulation de la totalité de la dette népalaise afin de desserrer l’étau financier qui pèse sur les capacités de redressement du pays. S’engager dans cette voie de solidarité et de co-développement, c’est reconnaitre et promouvoir une logique où la satisfaction des intérêts populaires et humains prédomine sur celle des intérêts financiers.

mercredi 15 avril 2015

Awa, femme de ménage au centre des finances publiques, en grève depuis le 11 mars.


Ce mardi 14 avril, une affichette scotchée sur les grilles de la direction régionale des finances publiques dans le 4e arrondissement informe que l’accès à l’établissement sera fermé à partir de 15h30. Et pour cause, cet après-midi-là, les grévistes de la TFN (Prestataire de nettoyage des finances publiques) se sont donnés rendez-vous sur place, pour faire entendre leurs revendications.
En grève depuis le 11 mars, ces salarié-e-s, très majoritairement des femmes, issues de l’immigration, qui travaillent tous les soirs dans les bureaux des centres des finances publiques pour en assurer le nettoyage ont décidé de faire connaître la misère qu’elles subissent quotidien.
D’abord réticente à répondre aux questions, prétextant un mauvais français, Awa, fini par expliquer les raisons qui l’ont poussé à se mettre en grève avec ses collègues, pour la première fois de sa vie : « ils nous traitent comme des esclaves » explique-t-elle avant de continuer « il y a trop de travail, on y arrive pas parce que l’on doit tout faire en quelques heures, et on ne gagne pas assez d’argent pour pouvoir vivre avec nos familles ». Car là est le cœur du problème, ces femmes ne travaillent que quelques heures par jour, totalisant rarement plus de 10h de travail par semaine et plus de 500€ mensuel. La précarité des temps-partiels et des bas salaires subis au quotidien.
Alors à l’heure prévue le rassemblement a réuni une trentaine de grévistes et de militants syndicaux. Le mégaphone a raisonné, des tracts signés par les branches CGT et Solidaires des finances publiques ont été imprimés puis distribués.
Ces femmes peu habituée à exposer leurs aspirations revendiquent désormais haut et fort des contrats de travail de 16h hebdomadaires minimum, le versement d’un 13e mois ainsi que le remboursement à hauteur de 50% de leur frais de transport. Depuis des mois, elles ont interpellé leur employeur et l’état, donneur d’ordre. Aucune réponse ne leur a été adressée. Soutenues par les organisations syndicales des finances publiques et par les agents des centres dans lesquelles elles travaillent (nombreux d’entre eux ont signé une pétition de soutien), ces femmes ont refusées de se résigner à ceux que leurs revendications restent lettre morte. Leur détermination est intacte après plus d’un mois de lutte, ce qui fait dire au représentant CGT qui accompagne leur grève qu’elles « ne lâcheront rien, qu’elles seront intransigeantes sur leurs revendications ».

Il va même jusqu’à faire un parallèle avec l’emblématique lutte des femmes de ménages grecques du ministère de l’économie qui ont engagé en 2013 une lutte de 19 mois contre l’annonce de leurs licenciements, devenant le symbole de la résistance du peuple grec aux politiques d’austérité. Le 29 janvier dernier, elles étaient ré-intégreés suite à la victoire de Syriza, parti de la gauche anti-austéritaire.  L’issue heureuse de leur lutte constitue évidemment « un modèle » pour les travailleuses de la TFN.

Plus près de chez elle, la victoire de femmes de chambre du palace parisien Park Hyatt contre la précarité salariale et les cadences infernales il y a quelques semaines ont sans doutes nourris les aspirations d’Awa et de ses collègues.
La multiplication de ces mobilisations dans les secteurs les plus précaires de notre économie (hôtellerie, nettoyage…) témoignent de la vitalité des aspirations du monde du travail à de meilleures conditions de travail  et de rémunération salariale. Leurs victoires montrent que ces choix ne sont pas confisqués, que la route du progrès social n’es pas une route définitivement « barrée ».
Le gouvernement, élu par les forces du travail devrait s’en souvenir plutôt que de parler uniquement la langue du patronat. Aimer l’entreprise ça ne peut pas être aimer la direction de TFN sourde aux revendications de ces salariés malgré 1,3 milliards d’euro de chiffre d’affaire. Aimer l’entreprise, c’est aimer les employés, les travailleurs qui la font vivre au quotidien, c’est être attentif à leurs revendications comme celles d’Awa et de ses collègues.

lundi 2 mars 2015

Face aux attaques de la droite municipale, vivent les bourses du travail !


Elles font rarement la une des médias, elles sont rarement célébrées, pourtant, elles jouent un rôle déterminant dans la défense des droits et des intérêts des millions de salariés de notre pays. Elles, ce sont les bourses du travail.

Les premières bourses du travail appariassent à la fin du XIXe siècle. A l’image de la bourse du travail de Paris, elles sont d’abord destinées à enregistrer et communiquer les offres et demandes d’emploi ainsi que les principaux « prix du travail » débattus selon l’offre et la demande (d’où le nom de « bourse du travail »). Mais très vite, ces bourses du travail, administrées par les syndicats vont devenir des lieux d’effervescence syndicale. Elles vont accueillir syndicats, mutuelles, association d’éducation populaire et coopératives et devenir de véritables lieux de solidarité, de convergence et d’organisation du mouvement ouvrier.

Aujourd’hui encore, les bourses du travail constituent un outil indispensable dans la défense des intérêts et des droits des salarié-e-s. Implantées dans la plupart des grandes villes de France, elles fournissent des locaux aux unions locales des organisations syndicales. Ces « maisons des syndicats » permettent de déployer sur l’ensemble du territoire une implantation syndicale vers laquelle peuvent se tourner tous les salarié-e-s, notamment ceux des petites et moyennes entreprises qui ne bénéficient pas sur leur lieu de travail d’une véritable représentation du personnel.

Ces bourses du travail mettent à disposition des syndicats et des salarié-e-s des lieux de réunion et d’organisation. Elles hébergent des permanences syndicales et juridiques, permettant de recevoir et d’informer l’ensemble des salarié-e-s. Elles reçoivent souvent l’organisation de formations des élu-e-s du personnel. Leurs missions sont donc extrêmement nombreuses et garantissent la liberté d’expression et l’indépendance d’action des organisations syndicales.

En plus d’abriter et de préserver la mémoire de tou-te-s les travailleu-rs-ses et des nombreuses luttes qu’ils ont mené à travers les siècles pour conquérir de nouveaux droit, les bourses du travail demeurent aujourd’hui un espace d’information et de défense des droits des salarié-e-s qu’il convient de protéger dans un contexte de recul du code et de l’inspection du travail.
Pourtant.
Pourtant, c’est exactement l’inverse qui se produit. En effet, dans de nombreuses municipalités qui ont basculé à droite à l’occasion des dernières élections, c’est une véritable chasse aux bourses du travail qui s’organise. Souvent propriétés de la ville dans lesquelles elles sont implantées et bénéficiant de subventions publiques décidées par les municipalités de gauche précédentes, les bourses du travail sont aujourd’hui menacées par une droite municipale déterminée à affaiblir et liquider ces outils de solidarité et de progrès. Depuis quelques mois, les attaques se sont multipliées, au Blanc-Mesnil, à Aubagne, à Villejuif ou à Toulouse, les nouvelles municipalités de droite ont engagées des procédures de fermeture des bourses du travail et d’expulsion des organisations syndicales.

Les arguments financiers avancés ne trompent personne, derrière ces attaques, ce sont bien des réflexes revanchards et idéologiques qui sont à la manœuvre contre les droits des salarié-e-s. Ils s’inscrivent d’ailleurs dans une offensive de plus grande ampleur contre le droit syndical et les mouvements sociaux.

Convaincu-e-s de l’utilité de ces espaces de solidarité dans la défense du monde du travail, les militant-e-s de gauche ne peuvent pas se résoudre à leur liquidation.

Partout où elles sont attaquées, des mobilisations s’organisent pour exiger le maintien des bourses du travail.  Ces mobilisations populaires doivent s’amplifier pour adresser un message clair: les bourses du travail sont le bien commun des travailleurs-euses, elles ne sont pas à vendre!

Au-delà des résistances locales, ces attaques doivent interpeller la gauche politique. Peut-on accepter que lorsque la droite revient aux affaires localement, elle saborde, par idéologie, un outil précieux du dialogue social, de l’information et de la défense du monde du travail ?

Comment pérenniser l’existence et l’action des bourses du travail ? Comment s’assurer que leur mission d’intérêt général ne soit pas prise en otage par des petites revanches politiciennes locales ?

La gauche doit investir la question et y apporter des réponses. Elle ne doit pas redouter le dialogue social et les organisations syndicales, elle doit, au contraire, créer les conditions de leur renforcement et leur offrir des débouchés politiques.

Parce qu’elles constituent des contre-pouvoirs précieux à la démocratie et à notre modèle social, les bourses du travail doivent être généralisées sur tout le territoire. Chaque salarié-e, doit pouvoir trouver à proximité de son lieu de travail un espace d’information, de défense et de solidarité. Cette généralisation doit se traduire par une implantation dans chaque sous-préfecture d’une bourse du travail à gestion paritaire des organisations syndicales selon leur représentativité. Son financement, afin qu’il soit constant et suffisant pour couvrir les frais de fonctionnement,  doit reposer sur une mise à contribution financière de l’ensemble des entreprises implantées sur le territoire. Voilà une réforme du monde du travail qu’un gouvernement de gauche pourrait porter, utile au dialogue social, à ses acteurs-rices et aux salarié-e-s.

samedi 21 février 2015

De quoi le 49-3 est-il vraiment le nom?


Mercredi dernier, Manuel Valls montait à la tribune de l’Assemblée Nationale pour annoncer que le gouvernement avait recours à l’article 49, alinéa 3 de la Constitution pour faire adopter, sans vote, le projet de loi Macron, dont l’orientation avait été fortement contestée ces dernières semaines jusque dans les propres rangs de la majorité.

Mais de quoi le «49-3 » est-il vraiment le nom ?
 
C’est d’abord le nom d’une 5e République à bout de souffle.

Une République dans laquelle le président et le premier ministre peuvent décider de soustraire l’adoption d’un texte de loi à la souveraineté nationale. Comment ne pas ressentir un profond malaise devant ces députés socialistes qui applaudissent fanatiquement lorsque le premier ministre leur annonce le recours au 49-3. Ne se rendent-ils pas compte que par cette manœuvre, on les dépossède de la souveraineté populaire dont ils sont les dépositaires ? Ne se rendent-ils pas compte qu’à travers eux, c’est le peuple qu’on dessaisit ?

Qu’ils réécoutent François hollande, celui de 2006, qui déclarait à propos du 49-3, que s’apprêtait à utiliser le gouvernement de Dominique de Villepin pour faire adopter le CPE : « C’est une brutalité, c’est un déni de démocratie ».

Qu’ils relisent les amendements déposés par les parlementaires socialistes en 2008 (dont M. Valls et M. Le Roux) dans le cadre du projet de loi de modernisation des institutions de la Ve République, qui demandait qu’aucun projet de loi, projet de loi de finance mis à part, ne puisse être adopté par la voie de l’article 49-3.

Ce coup « d’autorité » comme le revendique le premier ministre est en réalité un passage en force. Ce n’est en aucun cas un acte de courage, c’est un triste et consternant contournement démocratique.

Les institutions qui rendent possible une telle manœuvre sont des anomalies qui doivent être profondément remaniées. Plus que jamais le combat pour une 6e République doit être porté pour qu’à l’avenir, rien ne permette d’échapper au débat parlementaire et à la souveraineté populaire.

C’est le nom d’une orientation politique qui n’a plus de majorité à l’Assemblée Nationale.

C’est le principal enseignement de cette séquence politique. L’orientation politique et les choix économiques effectués ces derniers mois, en rupture avec les engagements de la campagne de 2012, ne dispose plus d’une majorité à l’Assemblée Nationale. Après n’avoir pas été dans la capacité de rassembler toutes les forces de gauche au lendemain de la victoire de 2012, ce gouvernement a, par les choix politiques qui ont été les siens, écarté les écologistes du gouvernement puis profondément fracturé sa propre majorité. La multiplication de ses renoncements, puis sa lente mue en faveur d’une politique libérale et austéritaire ont d’abord été mis en minorité dans les urnes par un peuple de gauche qui s’est détourné de ce gouvernement, à mesure que ce gouvernement se détournait de ses aspirations. Aujourd’hui, il est mis en minorité dans l’hémicycle. Pas de majorité progressiste pour une politique qui ne l’est pas.  

Manuel Valls, drapé dans les habits trop grands d’un premier ministre « de combat » est en réalité  à la tête d’un gouvernement des fonds de tiroir, rabougri, rapetissé faute de n’avoir su fédérer et rassembler autour d’une véritable ambition de transformation sociale et écologique de notre société.

Pourtant une majorité de gauche existe au parlement, claire et large. Il n’y a pas de fatalité.  Cette majorité pourrait disposer d’un soutien populaire si elle s’attachait à user de la dépense publique pour répondre aux besoins populaires à la création d’emplois et à la transition écologique. Si elle livrait un vrai combat contre les logiques de financiarisation de notre économie en frappant le capital, les actionnaires et les revenus financiers. Si elle engageait fermement le combat pour le partage des richesses en augmentant les bas salaires et en retrouvant le chemin du progrès social.

Pour faire tout cela, il existe une majorité rose, rouge, verte à l’Assemblée Nationale. L’exemple grec de Syriza nous rappelle qu’il n’y a pas de fatalité à ce que la gauche au pouvoir tourne le dos à ce qu’elle a promis avant d’y parvenir.

Tout-e-s les député-e-s qui partagent cette certitude doivent entamer ce travail commun. Sans eux, il n’existe pas de majorité pour la politique austéritaire du gouvernement Valls. Avec eux, un nouveau chemin est possible. Ils sont la pierre sans laquelle on ne peut rien construire de vieux, mais à partir de laquelle on peut rebâtir.

C’est enfin le nom d’un gouvernement « réformateur » qui ne l’est plus.

Le premier ministre, dans un exercice périlleux de service après-vente, se pose depuis ce mercredi comme celui que rien n’empêchera de « réformer »  la France. « La loi croissance et activité passe à l’Assemblée. Rien n’arrête le mouvement de la réforme » s’empressait-il de tweeter jeudi soir. « Même pas la démocratie ! » serait-on tenté de lui répondre.

La reforme comme finalité est devenu l’adage du premier ministre. Sans savoir pour qui ni même pourquoi, pourvu que l’on réforme. Pire le réformisme sauce Manuel Valls semble dorénavant s’apparenter à une succession de déréglementation. La rhétorique est bien rodée, souvent la même : le code du travail est un « répulsif à l’emploi », il faut le liquider réformer. Les 35h handicapent notre compétitivité, il faut les déverrouiller réformer. Le repos dominical nuit au développement économique, il fait le supprimer réformer. Les licenciements sont trop encadrés, il faut les faciliter réformer.

Monsieur le premier ministre, gouverner et réformer la France, ne peut pas se limiter à revenir méthodiquement sur les réformes du siècle dernier, surtout quand ces dernières se sont traduites par plus de protections, plus de droits et plus de justice. 

Faire cela, ce n’est pas réformer, c’est contre-reformer. Qu’on ne s’étonne pas, soudain, de ne pas trouver de majorité pour le faire.

 

lundi 12 janvier 2015

Syriza: l'éclaircie qui surgit d'Athènes


Les deux partis qui constituent la majorité gouvernementale grecque (libéraux de Nouvelle Démocratie et socialistes du Pasok), véritable bras armé des politiques d’austérité qui ont ravagé le pays ces dernières années, ont été mis en échec il y a quelques semaines. Malgré les injonctions du commissaire européen et ancien ministre des finances français, Pierre Moscovici dépêché sur place pour vanter les réformes engagées, la coalition gouvernementale n’a pu disposer d’une majorité suffisante pour faire élire son candidat à la présidence du pays. Cette situation provoque, en vertu de la Constitution grecque, l’organisation d’élections législatives anticipées le 25 janvier prochain.
Enfin, le peuple grec, prisonnier jusqu’alors de la tutelle de la Troïka va pouvoir s’exprimer démocratiquement. Enfin ce peuple, pillé, martyrisé, par des politiques d’austérité va pouvoir faire entendre sa voix. Enfin, la chaîne infernale va pouvoir craquer.
Depuis 2010, la Grèce a servi de cobaye au projet des libéraux européens. Après 23 plans d’austérité successifs, le pays est exsangue. Le salaire moyen dans le secteur privé a chuté de près de 20%, le chômage a progressé de plus de 190%, frappant 25% de la population et 52% des moins de vingt-cinq ans. L’échec économique est immense, les conséquences sociales le sont tout autant. La pauvreté a progressé de 33% dans le pays.  
Mais cette politique a profité à quelques-uns. Les services publics, liquidés par des vagues successives de privatisation ont été captés par des multinationales. Pire, une étude affirme que 77% des prétendus « plan de sauvetage », qui n’ont de sauvetage que le nom, ont bénéficié aux institutions bancaires et financières.
Après cinq années de résistance sociale, c’est cette page que le peuple grec va pouvoir enfin tourner en confiant une majorité parlementaire à Syriza, coalition anti-austéritaire, en tête des sondages d’intentions de vote. A n’en pas douter la popularité de cette gauche décomplexée réside dans le fait qu’elle a su apporter un débouché politique aux revendications et aux mots d’ordre d’un mouvement social qui n’a fait que se renforcer ces dernières années. Syriza a su être le réceptacle des luttes du peuple grec et en tirer toutes les énergies. Faisons nôtres les propos d’Alexis Tsipras, leader de cette coalition lorsqu’il affirme: « C’est un jour historique. Avec la volonté du peuple, dans quelques semaines, les plans d’austérité appartiendront au passé. L’avenir peut commencer ».
C’est d’ailleurs bien ce que redoutent les forces de l’argent et les gardiens de l’ordo-libéralisme européen. A-peine l’annonce d’élections législatives anticipées et les perspectives d’une victoire de Syriza que les grandes manœuvres ont commencé. Le FMI a immédiatement annoncé qu’il suspendait « son soutien financier» à Athènes, Wolfgang Schaüble, ministre allemand des finances a mis en garde « Il n’y a pas d’alternatives (…) les nouvelles élections ne changeront rien aux accords passés avec le gouvernement grec ». Le modèle de la « démocratie occidentale » dont ils n’ont de cesse de vanter les mérites ne semble plus si appréciable lorsqu’il permet au peuple souverain de reprendre la main et de bousculer les petits intérêts de l’oligarchie financière.
Faute de pouvoir décider à la place du peuple grec, tout ce petit monde tente de le faire basculer du côté des forces pro-austérité en entretenant un climat de peur et de chaos, promettant le plus grand des désastres en cas de victoire de Syriza. Le premier ministre grec sortant, Antonis Samaras, n’a pas hésité par exemple à utiliser le drame de Charlie Hebdo, dans un amalgame honteux, pour attiser les peurs en déclarant : « A Paris, il y a eu un attentat qui a fait au moins 12 morts, et ici, certains (Syriza) demandent plus d’immigrants illégaux. ».
Les militants progressistes de toute l’Europe doivent donc être pleinement conscients de l’importance de ces échéances électorales. L’enjeu est immense. Pour la Grèce et pour le continent. L’acte de résistance que s’apprête à effectuer le peuple grec en portant Syriza au pouvoir est une éclaircie dans l’obscurité austéritaire du ciel européen, l’occasion de réouvrir, enfin, le débat sur la construction européenne. En écartant l’impasse et les dangers qu’incarne l’extrême droite grecque et son parti Aube Dorée, les grecs font la démonstration que la solution ne se trouve pas dans un repli xénophobe et identitaire. Si ils montrent qu’un autre chemin est possible, d’autres suivront la lumière qui s’allume à Athènes.
Parce que les enjeux sont immenses, le combat sera rude. Rien ne sera épargné à Syriza. Ils feront tout pour que n’émerge pas en Grèce une gauche de transformation sociale qui viendrai troubler leur petit banquet. Nous devrons soutenir nos camarades. Ce combat et celui de tous ceux qui luttent en Grèce, en Espagne, en France et partout en Europe pour emprunter un autre chemin.

Pour faire vivre cette solidarité, rendons-nous nombreux au meeting « Soutenons le choix de peuple grec à prendre en main son destin » le jeudi 15 janvier, gymnase Japy à Paris (75011).
Vive la résistance du peuple grec. Vive Syriza.