mercredi 11 novembre 2015

Mouvement commun: lancement réussi. Continuons.

Il y a des moments politiques qui, par ce qu’ils insufflent, sortent de la morosité politicienne ambiante. A n’en pas douter, l’événement fondateur du « Mouvement commun » initié par Pouria Amirshahi, qui s’est tenu hier à Montreuil, est un de ceux-là. A la croisée des espoirs de citoyens orphelins d’un horizon de progrès et de solidarité, il nous a promené entre combativité et convivialité. Entre optimisme et participation collective. Un nouvel horizon.

Sous un soleil inattendu en ce début novembre, et sous le toit en tôle de la « Parole Errante», institution culturelle et militante de l’Est parisien, plus de 700 militants, acteurs associatifs, syndicaux ou citoyen-ne-s se sont réunis pour penser, pour dialoguer, pour échanger, pour construire « la France d’après ». Incontestablement, ce fût une réussite.
L’événement était préparé depuis de longues semaines, animé par une ambition : celle de faire de la politique vraiment autrement avec tou-te-s celles et ceux qui veulent un autre chemin à gauche. Et il y avait du monde.

Tout commence par la reconquête démocratique.


Ce rassemblement se voulait une réponse directe à la crise de notre modèle démocratique représentatif qui, à bout de souffle, se mue lentement en un modèle confiscatoire des pouvoirs et des richesses. Il s’agissait de donner la parole à ceux qui ont depuis trop longtemps l’impression que plus personne ne les écoute. Parce que lentement, le camp de ceux qui ont toujours été hostiles à ce que le peuple soit aux affaires est en train de prendre sa revanche sur l’immense héritage démocratique des Lumières et de la Révolution française.
Aujourd’hui, trop souvent ceux qui parlent et ceux qui décident sont ceux qui possèdent. Et ceux qui possèdent sont ceux qui décident et ceux qui parlent. Ils se connaissent, s’organisent et souvent se protègent entre eux. L’alternance politique de 2012 n’a hélas pas permis d’engager une rupture avec ce processus oligarchique.

Plutôt que de regarder s’éloigner dans le rétroviseur notre capacité à définir souverainement notre propre avenir, nous devons porter une nouvelle contagion démocratique. Pour bâtir un avenir commun, nous devons construire un mouvement commun.

Il ne s’agit pas d’importer le modèle grec ou espagnol de Syriza ou de Podemos, mais de s’inspirer de leur combat pour le prolonger chez nous. Nous ne nous résignons pas à ce que les solutions xénophobes de haine et de repli sur soi progressent dans notre pays alors qu’une issue de solidarité et de progrès fleurie chez nos voisins. L’énergie sociale de notre pays, sa profonde aspiration démocratique, l’étendue de sa recherche scientifique, sa devise de fraternité doivent nous permettre de formuler un nouveau projet politique commun et émancipateur. Dire cela, c’est refuser de rester un spectateur isolé face au grand risque démocratique qui s’avance. Nous voulons agir en commun pour proposer tout autre chose.

Faire autrement pour faire autre chose.


« Autre chose », c’est ce que nous avons fait ce dimanche en réunissant autour d’une même ambition des militants politiques issus de toutes les composantes de la gauche traditionnelle et la formidable énergie citoyenne issue de ceux qui font vivre l’alternative au quotidien dans notre pays. Ce mouvement est commun à tous ceux qui souhaitent faire vivre un « Nous » d’espoir et de progrès. D’où qu’ils viennent et quel qu’est été leur parcours personnel. La seule adhésion à laquelle nous nous référons n’est pas celle d’un parti, mais celle de vouloir emprunter ensemble un nouveau chemin.

« Autre chose », c’est ce que nous avons entendu. Ce dimanche après-midi, la « Parole Errante » aura fermé ses portes aux leçons de catéchisme libéral et aux grandes tirades qui nous répètent « qu’il n’y a pas d’alternatives ». En donnant la parole à Abdelhafed Errouihi, délégué CGT d’Air France ou à Nicolas Prevost, président de la SCOP de la papeterie de Docelles, c’est la voix de ceux qui défendent l’emploi et l’humain face à la violence des stratégies financières qui s’est exprimé. Et qui a été longuement ovationnée. En donnant le micro à Jean-Paul Sauzede, administrateur d’Habicoop, coopérative d’habitants, c’est la voix de ceux qui luttent contre la spéculation immobilière que nous avons entendu.  
« Autre chose », c’est ce que les responsables politiques ont fait ce dimanche. Présents nombreux, ils n’étaient pas à la tribune. Ils ont contribués, comme chacun et chacune d’entre nous à l’émergence de ce mouvement commun. Ainsi a-t-on pu apercevoir Danielle Simonnet se fondre à la table d’un des ateliers collaboratif, Pierre Laurent ou Cécile Duflot s’asseoir dans les travées de la plénière, loin des premiers rangs qui leurs sont d’habitude réservés, ou encore Guillaume Ballas s’échiner au rangement des chaises une fois l’évènement terminé.

Pour toutes ces raisons, cet événement aura été un succès et aura contribuer à dessiner un nouvel horizon.

Pour un mouvement commun qui s’inscrit dans le combat électoral. 


Ce travail, il va falloir le continuer ardemment.  « Autre chose », c’est ce qu’il faut construire désormais. Il faut faire « contre-culture » pour remettre au goût du jour les idées de solidarité, de renouveau démocratique et d’impératif écologique. Il s’agit d’engager une longue opération de reconquête idéologique, sans enjamber les échéances électorales qui s’avancent.

Car on ne peut pas faire état du dessaisissement démocratique qui frappe les citoyens et se résoudre à ce que les choix électoraux futurs ne se résument à devoir départager une droite qui s’extrêmise et une gauche qui l’est de moins en moins. Le dessaisissement démocratique c’est aussi accepter que la compétition électorale soit réservée à une poignée d’acteurs qui ont tous appartenus aux « gouvernants incapables de résoudre les questions du XXIe siècle ». 2017 ne doit pas être la grande revanche, des acteurs politiques et des idées, qui ont échouées dans notre pays ces vingt dernières années. Ce n’est pas cela un choix démocratique.

Cet « Autre chose commun » auquel nous aspirons, nous devons le faire vivre partout, et aussi dans la compétition électorale. Je le crois. La vie politique française et sa structuration idéologique sont largement adossées à l’élection présidentielle. On peut le regretter, mais c’est ainsi. La bataille culturelle que nous voulons réengager se mène toute l’année, partout. Elle vit et grandit chaque jour par la pratique de solutions alternatives concrètes qui, jointes, constituent cet autre chemin que nous voulons emprunter. Mais ne négligeons pas le porte-voix que représente l’élection présidentielle pour promouvoir et faire gagner cet autre modèle économique, démocratique et écologique.

Pouria a hélas raison lorsqu’il résume le paysage politique de 2017, pour le moment, à « des candidats soutenus par des appareils fatigués et souvent fatigants, qui proposent aux électeurs une série de mesures élaborées par quelques experts ». Le tableau est bien sombre, il correspond à une réalité palpable, mais je refuse de croire qu’il est immuable.

L’énergie et la détermination qui se sont dégagées de la journée de dimanche sont la démonstration que nous sommes des milliers de militants et citoyens disponibles pour écrire une autre histoire. Nous sommes des milliers à refuser que les sectarismes, les vieux réflexes partisans et les bisbilles d’appareils l’emportent sur la fervente volonté de créer un Mouvement commun qui puisse porter la belle colère de toutes celles et de tous ceux qui résistent à gauche.

Ces sentiments sont partagés bien au-delà de nos rangs. Dimanche, dans les rangées de la « Parole Errante » on pouvait croiser de nombreux militants communistes, écologistes, issus du parti de gauche ou d’ensemble. Leur présence atteste que tous connaissent l’impératif de parvenir à rassembler nos forces pour faire naître une nouvelle dynamique populaire. Tous savent aussi que cette dynamique politique devra être débordée par une insurrection collective et citoyenne la plus large possible pour partir à la reconquête des cœurs et des esprits.

Si nous disons tous cela, c’est que nous parlons la même langue : celle de ceux qui veulent partager les richesses et les pouvoirs. Cette voix, nous devons la porter ensemble. Notre capacité à la rendre audible et attractive dépendra de notre réussite à construire un grand mouvement populaire autour d’une candidature unique de la gauche alternative en 2017. N’y renonçons pas.

Prenons nos responsabilités. Pour faire mouvement commun,  appelons, partout où nous le pouvons, à la constitution d’Assemblées Citoyennes rassemblant les militants politiques d’où qu’ils viennent, les syndicalistes, les acteurs associatifs ou les citoyens pleins d’espoir. Ces Assemblées souveraines devront respecter la règle d’une personne = une voix. Déployons nos forces et notre savoir-faire pour que dans les mois qui viennent, chacune de ces assemblées, partout sur le territoire organise des cahiers de doléances du XXIe siècle en se tournant vers la société. Recensons et inspirons nous des « bonnes nouvelles » qui marchent dans nos régions. Collectons les idées nouvelles en donnant la parole à ceux qui ne l’on plus depuis trop longtemps. Faisons mouvement, et faisons-le en commun, à tel point qu’aucune décision personnelle, qu’aucun acte isolé, ne puisse venir ébranler l’édifice que nous allons bâtir ensemble. L’aspiration au rassemblement de toutes les forces de gauche porteuses de solutions nouvelles est immense, travaillons à ce qu’elle n’échoue pas aux portes des échéances électorales.

Peut-être n’y arriverons-nous pas. Peut-être le poison des égos des divisions et des sectarismes finira par l’emporter. S’ouvrira alors une immense tâche de reconstruction idéologique, culturelle et politique qu’il faudra être prêt à affronter. Mais peut-être aussi parviendrons-nous à rendre le chemin de l’unité incontournable. Ne préjugeons de rien, créons du commun autant que possible, additions les énergies disponibles. Nous verrons.

Dimanche, je ne sais plus quel intervenant nous a adressé cette jolie phrase que je me suis empressé de noter : « Les abeilles ne butinent pas les fleurs fanées ». Nous avons la responsabilité de tout faire pour que 2017 ne soit pas une fleur fanée. Il n’est pas trop tard.

 
 

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