lundi 17 mars 2014

Le 18 mars, dans la rue contre la loi du Medef, pour changer la gauche.

Le rendez-vous est pris depuis quelques semaines, le 18 mars prochain, au sortir des négociations sur le « pacte de responsabilité », les organisations syndicales CGT, FO, FSU, Solidaires appellent à une forte journée de mobilisation « pour exiger des mesures urgentes en faveur des salaires, de l’emploi, de la protection sociale et du service public » face à la dégradation de la situation sociale que connait notre pays.
Jeunes militants socialiste, communiste ou du parti de gauche, nous défilerons à leurs côtés le 18 mars.
Parce que nous refusons que ce gouvernement ne se réincarne en un porte-parole des vieilles lunes patronales, nous marcherons avec enthousiasme pour refuser les politiques mortifères d’austérité, le hold-up du pacte de responsabilité, et pour créer, dans l’unité, les conditions d’une riposte sociale suffisante pour renouer avec le progrès social et le partage des richesses.
Alors que l’on apprend qu’en 2013, le montant des dividendes versés aux actionnaires par les entreprises du CAC 40 atteint 39 milliards d’euros (soit 81% des bénéfices, un record historique), nous refusons de joindre nos voix à celles qui accablent un chimérique « cout du travail ». La « compétitivité » n’est qu’une marotte, agitée depuis des décennies, pour garantir les profits et délocaliser les conséquences de la crise sur le dos des salariés. 
Ce qui coûte cher à nos entreprises, ce qui grève leurs capacités d’investissement et d’innovation, c’est la sur-rémunération du capital. À ceux qui ne jurent que par le modèle allemand, nous faisons remarquer qu’entre 1999 et 2008, la part des richesses créées et reversées aux actionnaires sous forme de dividendes augmentait de 50 % en France, alors qu’elle diminuait de 10% en Allemagne. C’est à cette confiscation des richesses par quelques-uns, au détriment de tous, que la gauche doit s’attaquer.
Pacte de responsabilité : halte au hold-up.
C’est pourtant devant les intérêts de la minorité du Medef que le gouvernement semble avoir capitulé à l’occasion du pacte de responsabilité. « Un chèque en blanc au patronat » affirment les syndicats qui ont refusés de le ratifier. Et comment pourrait-il en être autrement alors que Pierre Gattaz, président du Medef, affirmait, lui-même, au lendemain des négociations : « Les entreprises décideront de l’usage qu’elles feront des allègements de charges promis dans le cadre du pacte de responsabilité, y compris pour la distribution de dividendes ». Le masque tombe. Les profits dégagés par les nouvelles baisses de cotisation seront les dividendes de demain. L’emploi, l’investissement et le renforcement de notre appareil productif attendront. Pas d’emplois donc, et moins de salaire, car exonérer les employeurs de cotisations sociales, c’est réduire la part du salaire qui ira financer la sécurité sociale. Dans le match qui oppose le capital au travail, le Medef tente à nouveau de tirer la couverture de son côté, en rognant sur les salaires pour distribuer des dividendes. Nous apportons notre soutien aux salariés qui se mobilisent au quotidien pour une politique salariale plus redistributive.
Austérité : attention danger.
Cette politique a un coût et l’on en connaît les modalités de paiement : l’austérité. En restant fidèle à l’orthodoxie budgétaire et en engageant notre pays dans le dogme de la « réduction des dépenses publiques », le gouvernement expose, encore un peu plus, notre économie aux conséquences de la crise. C’est en effet la contraction brutale de la demande et de l’investissement européen, sous les coups de rabot de l’austérité, qui a précipité l’économie de notre continent au bord du gouffre. D’ici à 2017, ce sont 50 milliards d’euros de dépenses publiques qui seront sacrifiées, impactant la consommation populaire. Le problème ne vient pourtant pas de l'offre mais de la demande. En 2013, 45% des entreprises industrielles françaises déclaraient avoir un problème de demande et 14% seulement déclaraient avoir un problème d'offre. La loi du Medef est coûteuse et dangereuse.
La riposte sociale pour ne pas se laisser faire.
Parce que nous sommes convaincus que la gauche n’est pas condamnée à enfiler les chaussures de l’austérité et de la baisse du coût du travail, au risque de nourrir la résignation, parce que nous sommes convaincus qu’il n’y a pas de fatalité à voir triompher la loi du Medef, nous défilerons le 18 mars avec ceux qui ont fait le choix de se mobiliser.
Cette mobilisation devra être une épine dans le pied de tous ceux qui crient d’une même voix « qu’il n’y a pas d’alternative ». Il est essentiel que cette journée soit une réussite : dans l’histoire, jamais aucune politique sociale ambitieuse n’a vu le jour sans un mouvement politique et social massif permettant de conquérir de nouveaux droits. Elle devra permettre d’inverser le rapport de force pour qu’il soit enfin favorable à la majorité sociale de notre pays. Nous serons aux côtés des salariés syndicalistes sur les piquets de grève, nous marcherons pour changer la gauche en créant les conditions d’une politique de progrès social et de partage des richesses.

David Guiraud (militant Parti de Gauche), Mathurin Levis (militant Mouvement des Jeunes Socialistes), Mathieu Perrone (militant Jeunes Communistes).

lundi 10 mars 2014

Que ceux qui baissent le poing s’en aillent. Lettre ouverte d’un militant socialiste à Jean-Marie Le Guen, député de Paris


« Pour un choc de vérité au sein du PS, à gauche et pour la France », depuis cette tribune que tu as co-signée avec une poignée de parlementaires socialistes en avril dernier, tu te rêves, Jean-Marie comme l’Homme qui serait capable de révéler « LA » vérité dont la gauche française a besoin, aveuglée, selon toi, par les « recettes du passé » et par l’influence de syndicalistes « véhéments et déraisonnables ».
Ne nous y trompons pas, cette « vérité », dont tu te targues d’être le révélateur, n’a rien de nouveau ou d’original. Ce n’est en réalité, rien d’autre qu’une triste récitation d’un catéchisme libéral éculé, dont tu connais parfaitement les paroles. Tout y passe : « Assumons notre volonté de renouer avec la compétitivité », « Expliquons qu’il faut […] plus de flexibilité au marché de l’emploi », « Poursuivons cette politique du sérieux budgétaire ». Le 20 février dernier, tu achevais même ta croisade par une diatribe contre…le code du travail. Ce texte qui garantit les droits des 18 millions de salariés que compte notre pays serait selon toi un « tabou national » et un « puissant répulsif de l’emploi ».
C’est précisément parce que tu sais que cette orientation politique n’est pas celle qui s’est exprimée le soir du 6 mai 2012, qu’elle n’est ni naturelle, ni majoritaire au sein de la gauche, que tu n’hésites pas à l’ériger comme une vérité indépassable qui s’imposerait à nous. Ceux qui s’y opposent seraient au mieux des « utopistes », au pire des « archaïques ». Il n’y a pas d’alternative comme disait l’autre. Pour renouer avec la sacro-sainte « compétitivité », il faudrait présenter la facture de la crise aux salariés : modération salariale, flexibilité, hausse de la TVA constituent les modalités de paiement.
Fin de l’histoire ? Non, car nous sommes nombreux Jean-Marie à affirmer qu’il n’y a pas de fatalité à ce que la gauche tourne le dos aux aspirations sociales et populaires qui l’ont portée au pouvoir, qu’il n’y a pas de fatalité à ce que les forces progressistes renoncent à faire avancer la roue de l’Histoire dans le sens du progrès et du partage des richesses.
Relayer les dogmes de la « compétitivité » ou du « rétablissement des comptes publics » comme tu le fais ne relève ni du courage politique, ni de la vérité, c’est faire écho et renforcer ceux qui veulent faire une OPA hostile sur le Changement et qui rêvent à voix haute de liquider les protections sociales « trop lourdes », le code du travail « trop rigide » ou les services publics « trop coûteux ». Faire consensus avec les exigences du patronat et des néolibéraux n’a jamais constitué une orientation politique, c’est nourrir la résignation dans notre camp et rompre avec la majorité sociale dont nous nous revendiquons.
D’après L’INSEE, entre 2002 et 2011, la progression du salaire net moyen dans notre pays a été inférieure à 6% tandis que le PIB a augmenté de 12%. Les travailleurs ont donc bénéficié de moins de la moitié des gains de productivité qu’ils ont créés par leur travail. Dans le même temps, on apprend que ces vingt dernières années, le taux de distribution des dividendes est passé de 2.5% de la valeur ajoutée à 9% de celle-ci, un montant jamais atteint depuis la seconde guerre mondiale.
Ce qui coûte cher aux entreprises, ce qui grève leurs capacités d’investissement, ce que tu ne vois pas Jean-Marie, c’est le coût du capital. Est-ce que cet argent doit être distribué aux actionnaires, ou réinvesti dans la recherche et le développement ? Là, nous devons avoir un vrai débat avec le patronat. Ce que tu ne dis jamais, c’est que diviser par deux les dividendes versés aux actionnaires, c’est libérer 120 milliards d’euros pour l’investissement productif, la création d’emploi ou une politique salariale plus redistributive.

Enfin, l’ampleur de la réduction des dépenses publiques que tu préconises ne peut avoir qu’un impact récessif sur l’emploi et l’activité. C’est en effet l’effondrement de la demande européenne, sous les coups de rabots de l’austérité qui explique la baisse du taux de marge des entreprises ces dernières années et donc une baisse de la production et une hausse du chômage.
Tandis que tu affirmes que seule cette politique est possible, force et de constater qu’elle n’a fonctionné nulle part. C’est sans doute pourquoi Obama propose, aux Etats-Unis une hausse du Smic de 40% en deux ans et que, sous l’impulsion du SPD, la coalition au pouvoir en Allemagne s’engage dans la création d’un salaire minimum. Tes « vérités », ce sont les vieilles recettes d’un vieux modèle qui nous conduisent à un échec économique et politique.
Pour triompher des conservatismes, et dépasser les intérêts des possédants, la gauche doit s’appuyer sur le soutien actif des forces sociales. Sans la mobilisation de celles-ci, l’ardeur réformatrice s’essouffle, et s’affaiblit. Voilà pourquoi je ne supporte plus Jean-Marie le discours virulent et méprisant dont tu fais preuve vis-à-vis des syndicalistes auxquels tu es confronté sur les plateaux de télévision. La gauche politique ne doit pas redouter ou condamner le mouvement social, elle doit, au contraire, l’utiliser comme un rapport de force et lui offrir des débouchés politiques.
Comme Paul Krugman, prix Nobel d’économie, nous exhortons les progressistes à s’extraire de la pensée économique orthodoxe que tu incarnes pour rester fidèle à leur exigence de transformation sociale.
C’est en investissant massivement dans l’économie que l’on permettra à l’Europe de sortir de la crise, que l’on réindustrialisera notre pays et que l’on préparera la transition énergétique, nécessaire à la préservation de notre environnement.
C’est en créant les conditions d’une politique de progrès social et en défendant les intérêts de ceux dont nous nous revendiquons que nous ferons reculer l’extrême droite qui prospère aujourd’hui sur nos renoncements.
Laissons les politiques d’austérité à la droite. Rassemblons largement les forces de gauche qui refusent de voir les aspirations du 6 mai confisquées par une « vérité contraignante ». C’est dans la rupture avec l’ordre établi que bat le cœur de la gauche, c’est là que se joue sa réussite. Que ceux qui comme toi, renoncent et baissent le poing s’en aillent, nous n’avons pas besoin de vous.